L’attaquante australienne a officiellement annoncé sa signature avec Chelsea jusqu’en 2022. Pour les Blues, son arrivée est une excellente nouvelle, mais quelles ont été les motivations de Kerr ?
C’est le passage obligé dont elle avait tant besoin : l’Europe. Cela faisait d’ailleurs plusieurs années que Sam Kerr ne cachait plus son envie d’y évoluer. Elle a pratiquement tout gagné, d’un point de vue individuel, aux Etats-Unis et en Australie : plusieurs fois élue soulier d’or, meilleure joueuse, et détenant le record du plus grand nombre de buts marqués dans chacun des deux championnats. Pourtant, elle a toujours été ignorée par les récompenses internationales. Boudée par le top 3 du Ballon d’Or ou du FIFA World Player of the Year alors qu’elle battait des records en NWSL et en W-League. Laissée de côté par le trophée FIFA The Best alors qu’elle tient à bout de bras la sélection nationale australienne en tant que buteuse et capitaine des Matildas. Tout ce qui lui manquait pour enfin être reconnue dans le monde du football était un peu plus d’exposition. La Coupe du monde ne lui en a pas assez donné. Peut-être que la Women’s Super League anglaise et la Ligue des Champions (l’année prochaine sûrement) la mettront enfin en valeur ?
Le suspense dure depuis plusieurs semaines. Depuis qu’elle a annoncé qu’elle ne renouvellerait pas ses contrats pour une nouvelle saison avec les Chicago Red Stars en été, ni Perth Glory en hiver. Elue meilleure buteuse et meilleure joueuse du championnat américain cette saison, après avoir qualifié les Red Stars pour la toute première finale de NWSL de son histoire, Kerr pouvait presque partir l’esprit tranquille. Le doute a plané longtemps sur sa future destination européenne. Au vu de l’importance majeure que lui accorde son sponsor, Nike, il était certain que l’Australienne n’irait pas atterrir à Lyon, Arsenal ou au CD Tacon/Real Madrid (tous sponsorisés par Adidas). Trois destinations en particulier semblaient être plus probables : Barcelone, Paris ou Chelsea.
Pourquoi ni le PSG ni le Barça ?
Les deux clubs sponsorisés par Nike offraient énormément d’atouts alléchants pour attirer Kerr (salaire correct, environnement de travail idéal, place en Ligue des Champions, etc.), mais présentaient plusieurs points qui faisaient que le déplacement en France ou en Espagne ne pouvait pas être une option sérieuse pour elle (en tout cas, pas pour l’instant).
Que ce soit la D1 Féminine ou la Primera División Femenina, objectivement, le niveau du championnat n’est pas à la hauteur. D’un point de vue compétition, il n’y a, tous les ans, que 2 ou 3 matches qui en valent réellement la peine. Ils sont tous face au seul rival avec qui le titre se dispute chaque année : l’Olympique Lyonnais en France ou l’Atletico Madrid en Espagne. Le reste du temps, les deux ligues n’offrent pas un niveau assez compétitif. Remporter la plupart de ses matches 5-0 ou 6-0 pour attendre une seule réelle confrontation intéressante dans l’année face au rival, ce n’est pas un défi suffisamment élevé pour Kerr. Elle explosait déjà son compteur but auparavant, et ce n’est pas cela qu’elle est vraiment venue chercher en Europe. A part d’être assurée de jouer dans le dernier carré de la Ligue des Champions pratiquement chaque année, il n’y a rien de très attrayant au PSG ou au Barça pour une attaquante et compétitrice du calibre de Sam Kerr.
Autre point important, la concurrence à son poste. Les deux équipes sont plus que saturées en avant-centres efficaces et pratiquement inamovibles. Paris a déjà Marie-Antoinette Katoto, Nadia Nadim, Kadidiatou Diani ou Karina Saevik. La qualité de la ligne d’attaque est encore plus impressionnante à Barcelone, avec Lieke Martens, Jenni Hermoso, Caroline Graham Hansen ou Asisat Oshoala. Le casse-tête pour les entraîneurs aurait été énorme afin de déterminer qui aurait dû être laissée de côté pour céder sa place sur le terrain à Sam Kerr.
Chelsea, le choix presque parfait
A l’inverse, du côté de Chelsea, il manquait encore à l’effectif une réelle avant-centre d’une efficacité imparable face au but. Kerr trouvera parfaitement sa place aux côtés d’attaquantes de qualité comme Fran Kirby et Erin Cuthbert, et sera mise dans les meilleures conditions pour marquer en jouant devant Guro Reiten, Ji So-Yun et Maren Mjelde. C’est comme si la numéro 20 australienne était la pièce manquante du puzzle des Blues.
Elle qui recherchait un réel défi sera plus que servie en Angleterre. La Super League devient, d’année en année, l’un des championnats les plus compétitifs et attrayants d’Europe. Les grands clubs investissent de plus en plus dans leurs sections féminines, et plusieurs équipes commencent doucement à montrer en puissance (comme Manchester United ou Everton), resserrant petit à petit les écarts dans le haut de tableau. Avec Chelsea, Kerr pourra affronter certaines des meilleures joueuses du monde, et se battre pour le titre face à des concurrents sérieux : Arsenal et Manchester City.
Donc concernant l’aspect sportif, Chelsea coche toutes les cases de la liste de Kerr. Et au niveau de l’exposition qu’elle désire, l’Angleterre semble aujourd’hui être l’une des plateformes les plus idéales pour se faire reconnaître. A moins de deux ans de l’Euro qui aura lieu là-bas, la popularité du football féminin ne cesse de grimper à une vitesse impressionnante. Cela s’est clairement vu pendant la Coupe du monde cet été avec une ferveur populaire sans précédent autour des Lionesses. Même après, lorsque 77.768 supporters ont rempli les tribunes de Wembley pour assister au match amical entre l’Angleterre et l’Allemagne au début du mois de novembre. Pareil pour les 38.262 supporters venues encourager Tottenham et Arsenal à l’occasion du « North London Derby. » L’arrivée de Kerr ne fera qu’attirer plus de monde dans les stades de WSL.
Le petit plus, et dernier aspect positif non négligeable dans le fait d’avoir choisi une équipe anglaise, est que l’Australienne ne devra pas faire face à la barrière de la langue. En parlant Anglais avec le staff et ses coéquipières, sa langue natale, l’Australienne parviendra à s’intégrer plus rapidement à l’équipe et à son nouvel environnement pour tout de suite se concentrer sur l’aspect sportif.
Chaque médaille a son revers. Et celle de Chelsea vient justement du fait que l’équipe n’est pas encore au niveau de Wolfsburg, du PSG ou surtout de Lyon sur la scène Européenne. L’équipe n’a jamais disputé la moindre finale dans la compétition. La saison dernière, les Blues ont cédé en demi-finale de Ligue des Champions face à l’OL, et en terminant 3ème de leur championnat, elles n’ont pas décroché de place pour l’édition 2019-2020. Si Sam Kerr veut enfin inscrire son nom au palmarès du Ballon d’Or, remporter le championnat Anglais ne suffira pas. Ce qu’il lui faut, c’est une Ligue des Champions.